Au volant du futur : comment l’IA redéfinit la formation routière pour réduire les accidents, l’énergie et les émissions liés à la mobilité…

par 15 Nov 2023

Le dernier bilan (2022) de la sécurité routière nous interpelle : 3 267 personnes ont perdu la vie sur les routes de France métropolitaine. Ce chiffre est en hausse sensible par rapport à 2021 (+ 10,3 %), année particulière du fait des restrictions de circulation liées à la lutte contre la pandémie de COVID-19, mais est comparable  au bilan de l’année 2019 (légère hausse de + 1,5 %), dernière année avant la crise sanitaire. 

Ce chiffre place la France métropolitaine au 15ème rang de l’Union européenne (27 pays) en termes de mortalité routière rapportée à la population : 50 personnes ont été tuées par million d’habitants en 2022

Un rapport, daté de 2021, de la Cour des comptes confirme que le principal facteur d’accidents est lié au comportements humain… Une étude référence de 2015 , confirmée par la Délégation à la sécurité routière (DSR), sur les facteurs déclenchants des accidents mortels a identifié que les facteurs humains contribuent pour 92% des accidents mortels, les facteurs liés à l’infrastructure pour 30%, les facteurs liés au véhicule pour 20% et les conditions de circulation pour 18% . Plusieurs autres études ont montré que dans 95% des cas d’accidents, il y avait au moins une erreur humaine…

Plus que le véhicule ou le contexte routier, c’est l’humain qu’il faut améliorer. Le rapport du comité des experts auprès du CNSR, (nov 2022) exprime bien cette volonté de continuum éducatif de la conduite :

“L’éducation et les actions de prévention sont essentielles pour apprendre à se déplacer dans tous les territoires, pour sa propre sécurité et celle des autres. Un continuum éducatif est mis en place dès le plus jeune âge, adapté aux modes de déplacement de l’enfant, de l’adolescent, du jeune adulte. Puis des actions de prévention prennent le relais. Le volet contrôle vient accompagner la diffusion de comportements sûrs”…  

Or les récents chiffres nous force à constater que ce continuum éducatif fonctionne mal : la France est le mauvais élève de la sécurité routière en Europe…

Ce sont les 18-24 ans qui comptent le plus de tués : 549 en 2022. Leur risque est le plus élevé (101 tués/Mhab). Pourtant, ils paient cher leur permis de conduire (de 1 468 euros à 2 140 euros)!

Si la formation des jeunes n’est pas aussi efficace qu’elle doit l’être, elle est inexistante chez les seniors – le nombre de tués âgés de 65-74 ans affiche la plus forte hausse (+ 21,8 %)- Quand à la prévention, elle se fait rare en entreprise où chaque année les accidents routiers professionnels (accidents de trajet domicile-travail et accidents de mission confondus) sont la première cause de mortalité au travail en France (454 personnes ont été tuées lors d’un trajet professionnel en 2021)…

A part l’introduction de simulateurs de conduite ces dernières années, l’éducation routière n’a pas beaucoup changé depuis 50 ans… Comment faire?

Sur la base de deux années d’ expérience dans l’analyse des données de conduite et l’automatisation de contenu pédagogique avec Drivata, nous sommes persuadés qu’il est possible d’améliorer le continuum éducatif avec l’intelligence artificielle (IA) pour relever certains des plus grands défis qui se posent dans le domaine de l’éducation routière aujourd’hui ; développer des pratiques d’enseignement et d’apprentissage innovantes pour enfin diminuer l’accidentalité mais aussi améliorer l’éco conduite.

Voici quelques cas d’usage : 

Gestion et mise en œuvre de l’éducation routière :

  • L’IA comme outil d’aide à la docimologie : pour concevoir, administrer et évaluer des tests, des examens ou des évaluations de manière objective, fiable et valide. Contribuer à l’amélioration de la qualité de l’évaluation des performances individuelles et à la prise de décisions éclairées en matière d’éducation et de formation routière.
  • Évaluer les performances des formateurs en fonction des résultats de leurs élèves. Cela peut aider à identifier les besoins spécifiques et améliorer la qualité de l’enseignement.
  • Automatisation de nombreuses tâches administratives des auto-écoles, telles que la planification des leçons, la gestion des horaires et du réglementaire ainsi que la communication avec les élèves pour concentrer les ressources vers la formation pratique et augmenter le taux de réussite à l’examen du permis.
  • L’automatisation de certaines tâches administratives réduirait les coûts de gestion des écoles de conduite et des actions de prévention en entreprise, ce qui peut éventuellement se traduire par des tarifs plus abordables…

Autonomisation des formateurs et de leur enseignement :

  • L’IA augmente la valeur de l’enseignement pratique grâce à l’analyse des données de conduite collectées à partir du smartphone dans le cas de Drivata. Les instructeurs peuvent ensuite utiliser ces informations pour adapter leur enseignement.
  • Feedback en temps réel : détection des erreurs courantes, comme les dépassements de vitesse, les manœuvres incorrectes, prise en main du smartphone avec avertissement de l’instructeur pour qu’il puisse intervenir immédiatement sans être présent physiquement dans le véhicule.

Apprentissage et évaluation des acquis :

  • Les chatbots et les agents conversationnels basés sur l’IA peuvent répondre aux questions des étudiants sur le code de la route, les règles de conduite et d’autres sujets liés à la sécurité routière et l’éco conduite, libérant le temps des formateurs pour plus de conduite pratique.
  • Des systèmes de suivi des performances basés sur l’IA peuvent fournir des retours instantanés, à l’échelle, aux élèves conducteurs, les aidant ainsi à s’améliorer en continu.

Formation hyper personnalisée :

  • L’IA peut adapter les programmes de formation, recommander des exercices spécifiques en fonction des besoins individuels et compétence des apprenants (jeunes, pros, seniors…), du  type de véhicules (auto, moto, PL…) mais aussi du contexte routier le plus parcourus (agglomération, péri-urbain, autoroute…).
  • Prédiction des accidents : en analysant les données de conduite et les facteurs de risque, l’IA peut prédire les zones à haut risque d’accidents de la route, permettant ainsi de cibler davantage les efforts de prévention en entreprise en fonction de l’activité professionnelle.

Le champ des possibles de l’IA au service de la formation routière est aussi vaste que long en incluant les étapes de la vie d’un conducteur:

  1. Conduite accompagnée
  2. Formations au code de la route et permis de conduire
  3. Formation post-permis (pour réduire la période probatoire)
  4. Campagnes de prévention en entreprise
  5. Communication grand public, sensibilisation ciblées des usagers  (alcool et stupéfiants)
  6. Examen d’aptitude à la conduite des seniors. 

Certains acteurs de la prévention comme ECF prévention, l’Automobile club association en France et le Touring Club en Suisse ont déjà exprimé beaucoup d’intérêts pour le développement d’un modèle d’IA au service de la formation à la conduite et de la prévention routière.

Faut-il rappeler que l’IA a été utilisée de manière innovante sur de nombreux projets ces dernières années ? Un exemple est le diagnostic médical pour identifier des modèles dans les données pouvant indiquer une certaine maladie ou affection. Ces informations peuvent être utilisées pour développer de meilleurs outils de diagnostic et de meilleurs traitements. De la même manière l’IA peut être utilisée pour détecter puis améliorer les comportements de conduite et ce à tout âge et pour tous les types de véhicules…

Les clés du changement sont dans la boîte à gants des pouvoirs publics afin d’encadrer une démarche innovante qui sauvera des vies, réduira les frais exorbitants des soins aux victimes sur la collectivité ainsi que la consommation d’essence et d’émission de CO2 liés à la mobilité…

Frederick Buhr

Co-fondateur Drivata

Projet financé avec le concours de l'union européenne avec le fond européen de développement régional

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